Intervention en séance plénière
Je partage la même émotion que mon collègue, M. Diallo, car il s’agit aussi de ma dernière intervention au sein de ce Parlement.
Comme il l’a affirmé en commission des Sports, mon groupe soutient naturellement le pro-jet de décret portant sur le mouvement sportif organisé en Communauté française. Ce projet de décret révise, suivant une même structure globale, le décret du 8 décembre 2006 visant l’organisation et le subventionnement du sport en Communauté française. Mon groupe regrette néanmoins que les conclusions de tous les travaux menant à l’élaboration du texte n’aient pas été transmises au Parlement pour analyse, comme le prescrit l’article 46, alinéa 2, du décret du 8 décembre 2006.
Le projet de décret concrétise plusieurs avancées en termes de bonne gouvernance, d’éthique ou de simplification administrative. Il répond également à certaines inquiétudes et pratiques arbitraires illégales qu’a pointées le secteur et qui ont largement alimenté la presse ces derniers temps.
Mon groupe est satisfait de la définition apportée au sport. Mes propos s’inscrivent en anti-thèse à ceux de mon collègue, M. Dodrimont. De ce fait, je souligne que la définition reprend clairement comme conditions cumulatives le fait que l’activité physique soit l’effet d’un entraînement cardiovasculaire ou d’un effort musculaire et qu’une activité motrice déterminante ait une in-fluence sur le résultat obtenu. Je rappelle, à ce propos, que l’intérêt de la référence à l’entraînement cardiovasculaire est qu’elle induit d’importants bénéfices en matière de santé. Ces conditions cumulatives excluent du champ d’application du projet de décret les sports de l’esprit tels que les «e-sports»qui, avant tout positionnement politique, doivent faire l’objet d’une analyse précise. Il convient d’analyser les défis juridiques et philosophiques que ces e-sports po-sent afin d’identifier par la suite la nécessité d’une réglementation. Nous ne l’évacuons donc pas totalement, mais nous estimons qu’une analyse juridique s’impose.
Ensuite, nous soulignons l’ajout d’une deuxième section au chapitre 1er«relative aux droits et obligations générales des fédérations et associations ainsi que de leur cercle et de la préservation de l’intégrité du sport». Cette nouvelle section poursuit un objectif noble d’intérêt général: la responsabilisation du mouvement sportif organisé face aux grandes questions de société, telles que le respect de l’éthique sportive, le respect des principes de bonne gouvernance, le respect de l’environnement qui entoure les espaces sportifs ou encore l’obligation générale de lutte contre la manipulation des compétitions sportives et le dopage dans le sport.
Nous saluons l’introduction du critère de respect des principes de bonne gouvernance pour 5% à concurrence desquels le calcul de la subvention forfaitaire de fonctionnement des fédérations et associations sportives sera fondée. La bonne gouvernance inclut en effet des sujets très variés, tels que les mesures visant à améliorer la représentation et la participation des femmes dans le sport, la transparence, la lutte contre toutes les formes de discrimination, la lutte contre la corruption, les conflits d’intérêts, etc. Nous resterons donc attentifs au principe de base déterminant cette gouvernance adaptée ainsi qu’à la grille d’évaluation qui sera soumise aux fédérations et associations.
En ce sens, nous avons cosigné l’amendement qui nous a été proposé et qui vise à inscrire le principe d’égalité entre les femmes et les hommes dans le sport.
J’en viens à un troisième sujet plus sensible: les indemnités de formation. Nous sommes satis-faits et même soulagés de voir celles-ci expressément interdites lors de tout passage d’un cercle à un autre pour les sportifs évoluant en catégorie d’âge. À ce sujet, je tiens à souligner ici le combat mené par Mathilde Vandorpe. Depuis plus d’un an déjà, mon groupe milite pour leur suppression: il a interpellé le ministre Madrane sur cette pratique illégale consistant à réclamer aux parents une indemnité de transfert là où celle-ci doit être payée par les clubs souhaitant acquérir un joueur démissionnaire provenant d’un autre club. Depuis plu-sieurs années, ce contournement du prescrit de l’article10 du décret du 8décembre2006 est monnaie courante dans plusieurs clubs en Fédération Wallonie-Bruxelles et il entraîne des effets néfastes à la fois pour les jeunes, qui sont parfois contraints d’arrêter leur sport favori, voire de rester dans leur club sans pouvoir évoluer sportive-ment, ou pour les parents, qui sont obligés de contracter un emprunt. Il convenait d’y mettre un terme.
Nous serons extrêmement vigilants à l’égard des canaux de communication qui seront déployés par le prochain ministre des Sports pour qu’il as-sure une parfaite information des sportifs et des parents afin ne pas retomber dans les mêmes travers au sein des équipes premières, voire égale-ment en catégories inférieures. Certains clubs peu scrupuleux pourraient continuer à réclamer indûment des indemnités de formation aux parents mal informés alors que celles-ci seront désormais totalement prohibées.
Pour rappel, nous avons souhaité que le texte prévoie une évaluation spécifique de cet article décrétal au second semestre 2020, après la période s’écoulant du 1erau 30 avril, afin d’évaluer les effets positifs et les dérives éventuelles. Pour notre part, l’évaluation du décret tous les quatre ans prévue à l’article 44 reporte trop loin le débat sur le sujet.
Nous pensons au risque de voir les cotisations des clubs ou le prix de vente des joueurs augmenter. Nous espérons que tel ne sera pas le cas, mais étant donné les enjeux financiers et humains qui en découlent, cela aurait été plus prudent !
Nous regrettons également qu’un organe de contrôle des clubs ne soit pas créé pour assurer la bonne application du texte décrétal et le porter à la connaissance des parents. Dès lors, de manière plus générale, nous souhaiterions savoir précisé-ment quels seront les organes chargés de l’évaluation du présent projet de décret et quelles seront les modalités de cette évaluation. En effet, rien n’est prévu dans le commentaire des articles.
Enfin, Monsieur le ministre, contrairement à certains, nous sommes satisfaits de voir que, à la suite des précisions que vous avez apportées en commission, les missions de la Ligue handisport francophone (LHF) et de la Fédération multisports adaptés (FéMA) seront bien identifiables et que ces deux associations seront bien toujours reconnues sous certaines conditions. L’absence d’un commun accord pour une éventuelle fusion peut également résulter du principe constitutionnel de la liberté d’association et de l’autonomie de fonctionnement dès lors que, si le public cible auquel elles s’adressent respectivement correspond aux personnes en situation de handicap, les missions qu’elles mènent sur le terrain au quotidien n’en restent pas moins distinctes. Pour la LHF, il s’agit de mener les handisportifs à la compétition de haut niveau, et donc aux jeux paralympiques; pour la FéMA, il s’agit de développer davantagele sport de loisir, également pour les personnes dites en incapacité, c’est-à-dire les personnes souffrant de maladies chroniques et dégénératives.
À l’inverse, nous regrettons que les subventions aux clubs moins valides, qui étaient précédemment accordées sur la base de l’article27 du décret du 8décembre2006, soient annulées, tant pour la LHF que pour la FéMA. En effet, certaines personnes polyhandicapées ne pourront jamais être intégrées dans les structures valides, d’où la nécessité, selon nous, d’aider financièrement des clubs plus spécifiques proposant des activités adaptées aux publics cibles et qui nécessitent un encadrement plus soutenu.
Le principe d’inclusion, tel qu’il est porté par tout le monde aujourd’hui, doit cohabiter avec le maintien d’organisations aux activités adaptées à un public très spécifique. Le financement de ces activités reste donc un sujet de préoccupation.
Monsieur le Ministre, nous vous remercions d’avoir amélioré le cadre décrétal. Nous espérons que la mise en œuvre du décret produira des effets positifs, aussi bien en faveur du sport de haut ni-veau que du sport pour tous, au travers des valeurs fondamentales que le sport inculque à chacun.
J’en profite pour vous remercier pour l’ampleur du travail accompli, même si nous n’étions pas toujours d’accord. J’ai apprécié votre fairplay politique digne de celui d’un sportif de haut niveau.
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