Politique climatique retardée : que font les Régions ?

Publié par andredubus le
Question à Madame Evelyne Huytebroeck, ministre bruxelloise de l'environnement, de l'énergie, de la politique de l'eau et de la rénovation urbaine

André du Bus. - Madame la Ministre,

Comme vous le savez, le dossier « Burden sharing », du nom du mécanisme prévu par le protocole de Kyoto, est la répartition entre les entités belges des efforts liés aux objectifs nationaux en matière de politique climatique.

Ce dossier regroupe trois objectifs :

  • la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le développement des sources d’énergie renouvelables définis dans le paquet énergie-climat européen ;
  • les objectifs de financements internationaux à court-terme « fast start » (2010 – 2012) et à long terme (2013-2020) ;
  • et, enfin, la répartition des recettes issues du système ETS dès 2013.

Tous les dossiers « Burden sharing » sont donc liés et doivent être répartis entre les différentes entités compétentes (les trois régions et le fédéral) au sein de la Commission Nationale Climat.

La Conférence des Parties (COP15), qui a eu lieu à Copenhague en décembre 2009 dans le cadre de la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques (CCNUCC), a débouché sur plusieurs engagements. L’un de ces engagements est d’aider les pays en développement à combattre les effets des changements climatiques, à diminuer leurs émissions de CO2 et à limiter la déforestation.

C’est lors de la COP16 à Cancùn en décembre 2010 que les objectifs européens en matière de financement ont été décidés. L’Union européenne s’était engagée à financer le fond « Fast Start » à hauteur de 7,2 milliards pour la période 2010-2012. Pour la Belgique, nous nous sommes engagés à hauteur de 150 millions € dont les détails du financement devaient être annoncés à l’Union européenne avant le 30 septembre 2012.

Malheureusement, aucun accord n’a pu être trouvé à temps entre les 3 Régions et le fédéral.

L’urgence climatique est un débat fondamental que nous abordons régulièrement au sein de la Commission environnement et mon groupe estime qu’il est indispensable que nous honorions nos engagements en la matière. C’est pourquoi les négociations au sein de la Commission Nationale Climat doivent aboutir le plus rapidement possible. La budgétisation à hauteur de 6,8 millions € de la contribution bruxelloise au fonds « Fast Start » est dès lors un pas important vers une répartition juste et équilibrée du financement entre les régions et le Gouvernement fédéral qui tienne compte notamment des réalités budgétaires de chacun.

Depuis le dépôt de mon interpellation, nous avons pu assister à l’échec de la Conférence de Doha. En effet, un accord a été arraché (ou imposé ?) au dernier moment par l’organisation Qatarie. Fort heureusement, la période d’engagement au Protocole de Kyoto a été prolongée avant, espérons-le, un accord global en 2015.

En ce qui concerne l’aide financière aux Pays du sud pour faire face aux changements climatiques, le récent accord de Doha « presse » les pays développés à annoncer de nouvelles aides « quand les circonstances financières le permettront » et à soumettre lors de la prochaine conférence des parties à Varsovie en décembre prochain.

Madame la Ministre, voici mes questions :

  • Un accord est-il aujourd’hui proche d’être conclu ? A quel niveau avez-vous pu faire avancer les négociations au sein de la Commission Nationale Climat ?
  • Quelle est la clé de répartition que vous avez décidé de défendre lors des négociations ?
  • Pourquoi ne pas avoir budgétisé notre participation au fond « Fast Start » lors de l’élaboration du budget 2012 étant donné que ce fond couvre la période 2010-2012 ?
  • Quel calendrier a été décidé afin d’atterrir dans ce dossier ? Confirmez-vous l’organisation d’un sommet du type « Ostende II » tel que proposé par le Secrétaire d’Etat Wathelet en marge de la conférence de Doha ?
  • La Belgique et la Région bruxelloise en particulier encourent-elles une sanction au niveau européen ou international pour le retard enregistré ?
  • Peut-on s’attendre à de nouveaux engagements de la part de la Belgique et de l’Europe de façon générale en faveur des pays en voie de développement d’ici la Conférence de Varsovie ?

Je vous remercie pour vos réponses.

Madame Evelyne Huytebroeck, ministre. - Les politiques climatiques sont principalement discutées au sein de la Commission nationale Climat.  C'est le cas du dossier relatif à la répartition entre les entités belges des efforts liés aux objectifs nationaux en matière de politique climatique, communément appelé "Burden sharing".

Le burden sharing traite de différents éléments : les premiers objectifs concernent la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le développement des sources d'énergie renouvelables, qui sont définis dans le Paquet énergie-climat européen.  La Belgique s'est vue attribuer un objectif de 15% de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de 13% de développement des énergies renouvables.

Le financement climatique international fait aussi partie des éléments à répartir.  Celui-ci est composé de deux volets : d'une part le financement à mise en oeuvre rapide, pour les années 2010 à 2012, et d'autre part le financement à long terme de 2013 à 2020.  Le financement de 2010 à 2012, le "fast start finance", ne fait a priori pas partie des éléments qui figurent dans ce dossier, mais il pourrait s'y retrouver par la force des choses, étant donné qu'il n'y a pas d'accord à ce stade entre les différentes entités qui y contribuent.

En ce qui concerne la contribution bruxelloise, je suis contente de pouvoir vous répondre que le Gouvernement bruxellois a réservé 6,8 millions d'euros au budget 2013 au soutien financier en matière de climat.  Cet engagement du Gouvernement permet donc à la Région bruxelloise de remplir ses responsabilités en la matière.  le Gouvernement bruxellois considère cependant que sa contribution doit être équilibrée par rapport aux autres Régions. C'est pourquoi, dans l'attente qu'une clé de répartition du montant global de 150 millions d'euros promis par la Belgique soit établie, le Gouvernement bruxellois a décidé de libérer une première tranche de 1,2 millions d'euros, qui correspond à un montant proportionnel aux deux autres Régions. Le reste dépendra de l'évolution des discussions sur la répartition du montant global.

Enfin, le dernier élément du burden sharing est la répartition des recettes issues du système ETS à partir de 2013, puisque les quotas alloués gratuitement aux entreprises jusque maintenant deviendront, au moins en parties payants.

Pour répondre à votre question sur l'évolution des discussions, la Commission nationale climat a été présidée durant l'année 2012 par le secrétaire d'Etat à l'environnement, Monsieur Wathelet.  La dernière réunion date du 31 mai 2012.  La Région bruxelloise avait alors insisté sur la nécessité d'entamer au plus vite les discussions, et une réunion avait alors été fixée en juillet. Le Fédéral a cependant reporté cette réunion jusqu'il y a peu, puisque celle-ci a eu lieu le 20 décembre, après de nombreuses demandes insistantes de notre part.

C'est lors de la prochaine réunion que les discussions reprendront et que nous pourrons enfin entrer dans le vif du sujet pour évoquer la répartition intra-belge des objectifs internationaux.

Il va de soi que ce dossier est sensible étant donné les enjeux qui y sont liés. Je constate par ailleurs que le Fédéral fait le choix, dans la presse, de reporter la responsabilité des efforts sur les Régions.  Il s'agit sans doute avant tout d'une posture politique à l'entame des négociations mais c'est probablement ce qui explique la méfiance dont la presse a fait état.

Cependant, je tiens à vous rassurer sur ce point, les discussions se feront dans un climat serein et nous y contribuerons bien entendu de manière la plus constructive qui soit, compte tenu de notre volonté d'aboutir au plus vite à un accord.